dimanche 19 avril 2009

Saturday Night Fever

Hier, une fois n'est pas coutume, Ahmed Kelly est parti en premier d'une soirée.

Le vin était pourtant bon, la cuisine goûtue et les convives sympathiques et bien connus d'Ahmed mais voilà Ahmed avait quelque chose d'autre en tête.
Vous qui connaissez Ahmed vous vous devez d'être surpris car vous le savez Ahmed part presque toujours dans les derniers, c'est une règle chez lui. En effet, quand on a le sens des affaires comme Ahmed on sait que c'est en fin de soirée que se font les meilleurs transactions et, d'autre part, Ahmed est méfiant et curieux, il veut donc autant que faire se peut être témoin de tout ce qui peut avoir lieu dans une soirée et encore une fois c'est lorsque la nuit se prolonge qu'il arrive les choses les plus croustillantes. Certains amis d'Ahmed à l'endurance moins développée arguent, quand ils s'en vont prématurément, qu'ils partent comme des princes. Mais cela n'impressionne pas grandement Ahmed, d'abord parce qu'un prince qui se respecte reçoit, il ne va pas s'abaisser à pénétrer dans la demeure d'un vulgaire roturier et ensuite parce qu'Ahmed a tout du prince : le port, la classe, le pouvoir et le piercing. Certains généalogistes ont même avancé l'idée que l'ascendance d'Ahmed était elle aussi princière mais ces messieurs sont bien loin de la réalité. En Lybie, Ahmed est sultan ; en Perse, il est shah ; au Luxembourg, le grand comte l'appelle "mon frère" ; en Russie, les Romanov lui font la révérence ; il a été hémophile et son sang à présent qu'il est guéri a quelques touches de violet (Ahmed a l'hémoglobine très intense). Et donc, en définitive, Ahmed connaît bien mieux les attitudes d'un prince que ses amis petits joueurs et trouve leur argument futile.
Mais il y a une autre raison à cette volonté de rester toujours jusqu'aux tréfonds de la soirée, une raison beaucoup plus spirituelle que les précédentes finalement bien terre à terre (night business is still business) : partir d'une soirée c'est renoncer à une ambiance, amoindrir une joie, écourter une folie. Et qui sait lorsque les dieux de la luxure et de la débauche accepteront de se repencher sur le berceau d'une nouvelle nuit ? L'offrande qui doit leur être faite et que trop peu de gens pense à faire, c'est Ahmed qui la sacrifie aux dernières heures de la fête précédente. Lorsqu'Ahmed part tôt, le risque est grand de voir ces dieux se fâcher et les soirées suivantes de tourner au fiasco si un autre shaman n'est pas présent. L'inculte s'imagine que la recette d'une réception réussie se trouve dans des cocktails travaillés, une musique entraînantes et des invités prolifiques mais c'est prendre le risque d'oublier les génies de la folie qui, s'ils ne trouvent pas l'ambiance à leur goût, ont tôt fait d'insuffler aux plus fragiles ou aux plus déments des convives l'étincelle qui, vulgairement, fera tout partir en couilles. Ahmed et les autres initiés savent, eux, qu'en amadouant Dyonisos et ses confrères ces mêmes génies allumeront le feu du plaisir et de la volupté.

Bref, l'amusement est un art bien plus délicat qu'il n'y parait mais heureusement Ahmed et ses amis veillent et ce n'est certainement pas un exhibitionniste bleu qui y changera quelque chose.
Quant à la soirée d'hier soir ne vous inquiétez pas, un bon ami d'Ahmed, Speedy J., était présent et a, sans aucun doute, flatté l'ego de qui de droit comme un berger flatte la croupe de sa plus belle brebis au départ de la transhumance.

Et puis vous comprendrez qu'Ahmed ne pouvait faire perdre la vue à tant de bons amis d'un coup ...

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